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Ces business qui se réinventent dans la continuité



Mercredi 23 Octobre 2013 - 11:44

Peut-on revisiter son métier tout en lui restant fidèle ? Assurément ! Se concentrer sur les usages initiaux tout en perfectionnant les manières d’y répondre est même devenu une spécialité dans certaines entreprises.


Ces business qui se réinventent dans la continuité
En 1889, une entreprise japonaise édite des cartes à jouer traditionnelles (les hanafudas) et les exporte aux États-Unis. À partir des années 1950, l’entreprise enrichit son offre de jeux de cartes, et diversifie son catalogue avec des jouets pour enfant. En 1970, la firme commercialise parmi les premières bornes d’arcades de l’histoire du jeu vidéo ; l’une d’entre elles arbore le titre Donkey Kong. La suite, tout le monde ou presque la connait : Nintendo est devenu en l’espace d’un siècle un empire de l’industrie du jeu.
 
Derrière cet exemple se cache une stratégie de développement singulière que l’on observe aussi chez quelques entreprises françaises. Ces entreprises campent un marché, se concentrent sur les usages, et s’efforcent d’y répondre toujours mieux en améliorant leur offre au gré des perspectives que leur ouvre l’innovation. Voici 5 exemples d’entreprises, de toutes les tailles et de tous les secteurs, passées maîtres dans l’art de se réinventer dans la continuité.

Bernardaud, la porcelaine parfaite

L’entreprise familiale Bernardaud compte 360 salariés. Elle a été fondée en 1863 et baptisée de son nom actuel d’après le patronyme de son premier patron emblématique : Léonard, qui l’acquiert en 1900. Ayant cerné le potentiel industriel des techniques de production de porcelaine, Léonard Bernardaud est aussi celui qui exportera le premier les produits de la firme à l’étranger. Originellement artisanale, l’entreprise devient industrielle et internationale. À leur arrivée à la tête de l’entreprise, Michel et Jacques Bernardaud, fils de Léonard,  modernisent à nouveau ses procédés de productions. « Ils sont les premiers à mettre en service un four tunnel alimenté 24 heures sur 24, non plus au bois, mais au gaz de ville, diffusant ainsi une chaleur constante pour des pièces plus solides est sans défaut ». Pierre Bernardaud, successeur de Michel et Jacques, apporte la culture du design à la maison limougeaude en sollicitant le styliste Raymond Loewy qui revisite pour l’entreprise le service en porcelaine. Michel Bernardaud, qui a pris le relais de son père Pierre à la tête de la société, résume ainsi la tradition du progrès continu cultivé par la maison : « chaque génération a apporté sa touche ».

Exalead, l’information en constant renouvellement

S’il est une filière où l’accumulation de l’innovation est érigée en véritable business plan, c’est bien celle des moteurs de recherche. Fin 2013, l’arrivée de la nouvelle version de Google, Hummingbirg succédant à Panda et Penguin, rappelait au public l’habitude de la firme de Mountain View d’actualiser constamment l’algorithme utilisé par son moteur de recherche pour classer ses résultats. Ce souci constant de perfectionnement est en réalité partagé par tous les acteurs du secteur de l’information : il en va de leur survie. Exalead, concepteur de moteurs de recherche français, conçoit ainsi des algorithmes pour répondre spécifiquement aux besoins d’information des entreprises. Spécialisée dans la recherche sur bases de données internes et externes, la firme n’était à l’origine qu’un simple moteur de recherche parmi d’autres. Elle est aujourd’hui devenue une véritable référence en matière de business intelligence et de traitement de gros volume de données. Aujourd’hui, « les solutions Exalead sont utilisées La Poste - Courrier pour l’indexation et l’agrégation de toutes les données liées à la logistique courrier », explique par exemple Axel Branger, directeur commercial de l’entreprise.

Oberthur Fiduciaire, le papier haute sécurité

Dirigée par Thomas Savare, l’entreprise Oberthur Fiduciaire est un autre exemple de ces entreprises construites avec l’accumulation de savoir-faire de plus en plus techniques. L’entreprise est aujourd’hui spécialiste de l’impression haute sécurité et de la fabrication de billets de banque. Fondée en 1842, ce n’est qu’au milieu du XXe siècle que cette imprimerie s’est lancée dans l’impression fiduciaire. Ses billets, généralement imprimés à partir d’une base en coton, se sont progressivement enrichis de nombreux dispositifs de sécurité, au fil du temps et des succès de R&D de l’entreprise. Irisation des couleurs, impressions à effets d’optiques, patchs sécurisés contre la reproduction : autant de gestes d’imprimerie ultra-techniques rendent les productions de l’imprimeur infalsifiable. Oberthur Fiduciaire offre aujourd’hui des services combinant un savoir-faire ancestral en matière d’imprimerie, une exigence élevée en matière de design et des compétences infaillibles en sécurité.

Ulti, le jus de fruits… technologique !

Fondée en 1986, Ulti Fruit s’est lancée dans un pari un peu fou : celui de s’imposer sur le marché des jus de fruit déjà très concurrentiel. Très vite est apparue la nécessité de se différencier pour réussir. Ulti fait alors évoluer son offre vers les jus de fruits frais. L’entreprise s’organise pour permettre l’acheminement de son produit, périssable, mais de grande qualité. « Commandé le matin, le jus est produit l’après-midi pour être livré le lendemain », explique -t-on aux clients de l’entreprise. Initialement distribués autour de leur site de production situé en région parisienne, les jus de fruits frais Ulti on finit par conquérir le reste du territoire national. Dès 1993, l’entreprise adopte en effet un procédé de fabrication innovant, la pascalisation, qui permet la stérilisation des jus par l’application d’une forte pression, à froid et donc sans altérer les qualités gustatives du produit. « Ce procédé permet de stabiliser le jus dont la durée de vie passe à 16 jours », détaille la firme. Les jus Ulti peuvent désormais traverser la France pour être consommés. De nombreuses enseignes telles qu’Auchan, Monoprix, ou McCafé les ont adoptés.

Damart, le textile intelligent

Damart est fondé en 1953 à Roubaix. Héritière de la tradition lainière, l’entreprise est en fait le prolongement des Établissements Thérin, société productrice de doublures de vêtements en tout genre. L’entreprise devient en effet Damart avec l’invention du Thermolactyl, tissu révolutionnaire capable d’isoler le corps humain du froid et de l’humidité extérieure. Le Thermolactyl est en effet l’un des premiers tissus techniques modernes ; il crée de la chaleur triboélectrique, c’est-à-dire en générant de l’électricité statique par frottement avec la peau. L’application du Thermolactyl est évidente : Damart en fait des sous-vêtements et son succès est immédiat. Depuis l’entreprise n’a cessé d’améliorer son produit. « Finie la sensation « électrique » éprouvée en l’enfilant, envolée la crainte des odeurs de transpiration », résument Les Echos , « le Thermolactyl a maintenant un touché coton ou soyeux et se tricote en fil ultra-fin ou à grosses mailles comme le cachemire ». L’innovation chez Damart lui a permis de toujours mieux servir ses clients, en respectant ses usages tout en lui offrant des à-côtés esthétiques.
 
Les produits issus de ces savoir-faire risquent au fil du temps de voir leur valeur marchande se dégrader, car ils tendent à devenir communs. Cela contraint donc les entreprises à repenser leur proposition de valeur. Pour l’heure, on n’a réinventé ni le billet de banque, ni le jus de fruit. Mais ce que ces entreprises ont dû, et su, réinventer, ce sont les qualités mêmes de ces produits du quotidien.


La Rédaction







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