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Arrêts maladie : l’Assurance maladie généralise les contrôles en visioconférence



Vendredi 5 Décembre 2025 - 17:13

Face à la montée des arrêts maladie, l'Assurance Maladie déploie un nouveau dispositif de contrôle : le télécontrôle par visioconférence. À compter du 1ᵉʳ décembre 2025, ce système entend renforcer la surveillance des arrêts de travail tout en modernisant les pratiques.


​Arrêts maladie, accidents du travail, maladies professionnelles, demandes d’invalidité... : le télécontrôle à tous les étages !

Depuis le 1ᵉʳ décembre 2025, l’Assurance maladie peut organiser des contrôles à distance dans le cadre d’un arrêt de travail. Ce changement intervient dans un contexte où les arrêts maladie pèsent lourd : les indemnités journalières ont atteint 11,3 milliards d’euros en 2024. L’objectif est clair : limiter les abus tout en optimisant les contrôles. Le nouveau dispositif, baptisé « télécontrôle », permet à un médecin-conseil d’évaluer la légitimité d’un arrêt de travail via visioconférence. Il s’applique non seulement aux arrêts maladie, mais aussi aux accidents du travail, maladies professionnelles et à certaines demandes d’invalidité.

Le processus est encadré et transparent. L’assuré reçoit deux jours avant un mail et un SMS précisant la date, l’heure et les modalités de connexion. La veille, un rappel est envoyé. Le jour du rendez-vous, il se connecte via smartphone, tablette ou ordinateur pour un entretien avec le médecin-conseil. En cas de difficulté technique ou de refus de la visio, un rendez-vous en présentiel reste possible. Selon l’Assurance Maladie, les garanties restent identiques à celles d’un contrôle en face-à-face. Le télécontrôle a vocation à simplifier les échanges.

Le télécontrôle, un moyen de lutter contre les arrêts de travail injustifiés

La généralisation du télécontrôle s’inscrit dans un contexte de hausse constante des coûts liés aux arrêts maladie. Les indemnités journalières versées ont atteint 11,3 milliards d’euros en 2024, après une progression de près de 28% entre 2019 et 2023. Le dispositif a d’abord été expérimenté pendant trois mois dans trois régions-pilotes (Normandie, Bourgogne-Franche-Comté, Occitanie). Cette phase test a donné des résultats jugés encourageants : environ 85% des assurés interrogés se sont dits « favorables » à une nouvelle convocation en visio.

Selon les premières données rendues publiques, 38% des arrêts de travail contrôlés en visio ont été interrompus à l’issue du télécontrôle. Autrement dit, plus d’un arrêt sur trois jugé par visioconférence a été considéré comme non justifié. Ces résultats illustrent pourquoi l’État et l'Assurance Maladie misent sur la visio : non seulement pour rationaliser les contrôles, mais aussi pour dissuader les fraudes et contenir la dépense publique.

Les arrêts de travail invérifiables, c'est fini ou presque

Ce dispositif a des implications directes pour les entreprises et les services de ressources humaines. D’abord, il modifie le rapport à l’absence : un arrêt de travail n’est plus difficilement vérifiable. Les entreprises peuvent désormais s’appuyer sur le télécontrôle pour s’assurer de la validité d’un arrêt avant de verser des indemnités complémentaires. Ensuite, en cas de décision d’invalidité de l’arrêt, l’employeur n’est plus tenu de verser un maintien de salaire complémentaire. De quoi renforcer la pression pour que les arrêts soient bien justifiés médicalement — un signal fort pour les salariés comme pour les employeurs.

Enfin, pour les managers et responsables RH, le télécontrôle pourrait rationaliser les processus internes : moins de gestion des convocations, moins de déplacements, plus de rapidité. Mais cela implique aussi une vigilance accrue sur la sécurité et la conformité des procédures, notamment en cas de contestation par le salarié.

Une évaluation de l'état de santé en présentiel restera possible

Le nouveau dispositif repose sur un cadre réglementaire clair : le télécontrôle ne remplace pas un examen clinique indispensable. Si une évaluation physique est nécessaire, l’assuré sera convoqué en présentiel. De plus, le recours au télécontrôle n’est pas automatique pour tous les arrêts : le médecin-conseil détermine si la visio est appropriée, en fonction de l’état de santé, de la pathologie ou des justificatifs fournis.

Malgré tout, la mesure suscite des inquiétudes. Pour certains professionnels, transformer un rendez-vous médical en visioconférence peut fragiliser la relation de confiance patient-médecin — surtout pour des pathologies complexes ou des malades chroniques. D’autres redoutent une approche trop administrative : l’arrêt maladie pourrait devenir davantage un outil de gestion des coûts que de protection sociale. Le risque est de stigmatiser les arrêts longs, même légitimes. 


Anton Kunin







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